Fraude au faux conseiller bancaire : les banques doivent rembourser !

« Les escroqueries et fraudes aux moyens de paiement sont en augmentation rapide en France », signalait le ministère de l’Intérieur cet été, en publiant ces données. En 2023, 411 700 victimes ont déposé plainte, contre 250 900 en 2016, soit + 64 % sur la période (+ 7 % par an).
Selon l’Observatoire de la sécurité des moyens de paiement de la Banque de France, l’arnaque aux faux conseillers bancaires a provoqué 134 millions d’euros de pertes en 2023 pour les clients des banques. Et encore s’agit-il des montants restitués par les établissements financiers aux victimes, forcément lacunaires, puisque ceux-ci ne remboursent pas si souvent, ce qui est bien le problème.
Non seulement les banques se montrent incapables de protéger correctement leurs clients. Mais en plus elles rejettent fort opportunément la faute sur la victime, l’accusant de négligence pour éviter de le rembourser des sommes parfois considérables qu’on lui a soutirées par ruse. Ceci est inacceptable et doit être combattu. D’abord à titre préventif.
Les faux conseillers bancaires vous manipulent
Pour éviter de tomber dans le piège, sachez détecter cette fraude au faux conseiller qui sévit depuis maintenant plusieurs années.
L’escroc se fait passer au téléphone pour un faux conseiller bancaire ou une personne du service anti-fraude de votre banque. Ce faux employé vous contacte car il « voit » une tentative d’opération frauduleuse s’effectuer sur votre compte. Vous le croyez, car c’est bien le numéro de votre agence qui apparaît sur votre téléphone, c’est bien votre nom et votre numéro de compte qu’il prononce.
Il vous demande d’agir sur votre téléphone ou de lui transmettre des informations confidentielles, par exemple un code de validation reçu par SMS. Le piège se referme alors : en croyant échapper à une opération frauduleuse, vous effectuez à votre insu un versement au profit de l’escroc.
Déposez plainte et demandez le remboursement
Si vous êtes tombé dans le panneau, surtout, conservez bien les preuves, numéros de téléphone, messages ou mails reçus, ordres de virement, relevés de paiements, etc.) de l’escroquerie dont vous avez été victime.
Vous devez déposer plainte pour escroquerie et en parallèle, demandez à votre banque le remboursement des paiements et/ou virements frauduleux que vous avez subis que vous n’avez pas autorisés. Car elle doit rembourser sans délai, sauf si elle considère que vous avez fait preuve d’une « négligence grave ». Et c’est sur l’interprétation de cette notion que le juge est amené à se prononcer. Plusieurs décisions récentes vont dans le sens d’un remboursement de la banque dans ce type d’escroquerie.
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Une jurisprudence contre la BNP qui fait date
Dans un arrêt du 23 octobre 2024, la Cour de cassation vient de donner raison à la victime d’une arnaque face à BNP Paribas qui refusait de lui restituer les sommes détournées, soit plus de 54 000 . « Le client qui se fait piéger au téléphone par un faux conseiller bancaire ne peut se voir reprocher par sa banque d’avoir commis une négligence grave, explique la Cour de cassation dans un communiqué d’explication, suite à cette importante décision de sa Chambre commerciale (pourvoi n° 23-16.267). Il a donc le droit d’être remboursé par sa banque des virements frauduleux. »
Dans cette affaire, l’escroc était parvenu à faire apparaître sur le téléphone portable de la victime le numéro d’appel de celui de sa conseillère bancaire. La fausse salariée de la banque avait assuré au client qu’en suivant ses consignes, il effectuait une opération sécurisée. « Le faux conseiller a usé de manœuvres destinées à mettre sa victime en confiance et à diminuer sa vigilance. » La Cour rappelle que « c’est à la banque de rapporter la preuve que son client a commis une négligence grave ».
Attention cependant, répétons-le, il faut garder toutes les preuves. Dans un arrêt du 23 avril 2024, la cour d’appel de Versailles a constaté que le client n’avait pas pu prouver que l’escroc avait utilisé le numéro de téléphone de la banque. La victime n’avait pas non plus démontré que l’escroc connaissait des informations personnelles, empêchant ainsi tout remboursement de la part de la banque.
La référence juridique à utiliser pour vous défendre
La banque est tenue de rembourser (art. L. 133–18 et suivants du code monétaire et financier), sauf si la fraude est le fait du client lui-même ou si l’escroquerie est due à une négligence grave du client (art. L. 133-23), C’est à elle d’apporter la preuve de la négligence grave.
L’article L. 133-19 II du code monétaire et financier stipule que « la responsabilité du payeur n’est pas engagée si l’opération de paiement non autorisée a été effectuée en détournant, à l’insu du payeur, l’instrument de paiement ou les données qui lui sont liées ».